Étagement altitudinal

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L'étagement, en écologie, est la disposition des caractères naturels en fonction de l'altitude et des climats qui en découlent. L'étagement de la végétation influence l'économie montagnarde, qui varie ainsi avec l'altitude.

Définition

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L'étagement altitudinal, ou simplement étagement, est la différenciation des espaces de montagne selon l'altitude. L'étagement est souvent représenté schématiquement en bandes horizontales homogènes, ce qui est simpliste, car la délimitation entre les étages est graduelle et variable selon les lieux, la latitude, l'orientation des massifs, et les activités humaines,,.

Origine et mécanismes

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Étagement altitudinal de la flore et de la faune de l'écozone paléarctique (illustration naturaliste pour enfants).

Influence du climat

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L'étagement de la végétation est dû aux fortes variations du climat selon l'altitude : température de l'air, rayonnement solaire, précipitations, nombre de jours de gel et d'enneigement, pression atmosphérique, vents, etc. Tous ces paramètres climatiques influent sur la végétation, créant des ensembles de plantes réunies par les mêmes affinités écologiques. Les espèces des plaines disparaissent au fur et à mesure que l'altitude augmente, et en haute montagne, seules quelques espèces capables de résister aux conditions extrêmes sont encore présentes.

Les limites des étages sont variables selon les régions et l'orientation : d'une part, les limites des étages sont plus basses sur les versants ombragés exposés au nord (ubac) que sur les versants sud (adret), d'autre part, plus on s'approche des latitudes nord, plus les limites des étages s'abaissent. L'orientation peut jouer un très grand rôle dans la répartition des végétaux : c'est par exemple le cas en Andalousie, dans la Sierra de Grazalema, où la partie occidentale du massif ne reçoit que 500 mm de pluie par an, contre 2 000 mm sur certains versants nord où l'évaporation est faible.

Principaux paramètres : la température et les précipitations

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Les deux paramètres qui influent le plus sur l'étagement sont les températures moyennes et les précipitations. Le froid agit de trois manières sur la végétation d'altitude : les températures extrêmes sont plus basses, les périodes de froid sont plus longues, et la période de végétation est plus courte. La température est le principal critère qui influence l'étagement sous les latitudes moyennes ou hautes.

Aux latitudes plus basses en revanche, ce sont les précipitations qui ont le plus d'importance, avec de grandes disparités selon les endroits et l'orientation. Dans les montagnes tropicales, les précipitations croissent jusqu'à une certaine altitude, créant des zones où l'humidité est constante, puis régressent, créant des zones arides à très haute altitude. Dans ces régions, les étages d'altitude sont parfois plus favorables à l'installation humaine que les plaines, qui peuvent subir plus de sécheresses. Cette situation s'observe en Éthiopie, où les étages les plus densément peuplés se situent entre 1 700 et 2 500 m.

Au fur et à mesure que l'altitude augmente, les forêts de feuillus laissent place à celles de conifères, eux-mêmes remplacés par les prairies d'alpage. Ces dernières finissent par laisser la place aux rochers nus éventuellement recouverts de neige. La faune évolue également avec la végétation et l'altitude.

Historique

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Premières descriptions (XVIIIe siècle)

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L'étagement est d'abord une notion botanique. Au XVIIIe siècle, quelques savants comme Joseph Pitton de Tournefort ou Michel Adanson décrivent la succession des végétaux selon l'altitude, sans théoriser l'étagement altitudinal. L'abbé Jean-Louis Giraud-Soulavie publie entre 1780 et 1784 une Histoire naturelle de la France méridionale où il fait le lien entre l'altitude et les végétaux présents, en décrivant cinq « climats » caractérisés par l'olivier, la vigne, le châtaignier, les « grands arbres alpins » et enfin le climat « alpin ».

L'étagement dans les Andes d'après Humboldt (1807)

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Une représentation de l'étagement altitudinal du Chimborazo d'après Alexander von Humboldt.

En 1802, l'explorateur et scientifique Alexander von Humboldt fait l'ascension du volcan Chimborazo, montant jusqu'à 5 790 m environ. Il laisse son associé Aimé Bonpland faire l'inventaire des plantes rencontrées, pendant qu'il étudie leur répartition spatiale selon l'altitude.

En s'appuyant sur ce voyage, il publie en 1807 le Tableau physique des régions équatoriales dans lequel il théorise et représente en détails l'étagement de la végétation dans les Andes, des basses terres à plus de 4 000 m. Ses travaux posent les bases de la biogéographie.

Définition de Schröter (1904)

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Au XIXe siècle, les approches se diversifient pour définir l'étagement altitudinal. Une synthèse du botaniste Carl Schröter, établie en 1904, rassemble 29 systèmes proposés par des auteurs aux points de vue différents : ils s'appuient sur le climat, la botanique, les activités humaines, ou quelques espèces emblématiques. Dans sa synthèse, Schröter définit les cinq étages qui restent encore utilisés habituellement aujourd'hui : collinéen, montagnard, subalpin, alpin et nival. Cette description s'inscrit dans un contexte de développement des activités de montagnes dans les Alpes du Nord, et la botanique n'y est plus le critère fondamental. Il s'agit plutôt d'une définition du paysage dans le système agro-sylvo-pastoral des Alpes.

Approches contemporaines

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La définition imaginée par Schröter est par la suite discutée et certains auteurs souhaitent la redéfinir. Paul Ozenda critique par exemple son approche, qu'il considère trop réduite à son contexte spatial, temporel et scientifique, et plaide pour une définition strictement écologique.

Le botaniste et biogéographe Henri Gaussen est à l'origine en France de la notion d'étages et de successions de la végétation, fondatrice de la phytogéographie. À sa suite d'autres chercheurs ont montré que l'empreinte des activités humaines (et du dérèglement climatique qui en découle) sur ces étages phytosociologiques et écopaysagers font que le modèle de l'étagement altitudinal théorique est à revisiter.

Le concept d'étagement altitudinal, d'abord restreint à la botanique, est aujourd'hui aussi utilisé dans d'autres domaines, comme la géomorphologie.

Classification

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Étages de végétation dans les Alpes

La classification traditionnellement utilisée est basée sur l'étagement de la végétation dans les Alpes et les Pyrénées, et comprend les étages planitiaire, collinéen, montagnard, subalpin, alpin et nival,.

On différencie schématiquement en Europe deux grandes régions bioclimatiques qui influent sur la zonation altitudinale : la région eurosibérienne, qui concerne toute l'Europe tempérée, et la région méditerranéenne. En France, le Massif central est situé à la limite entre ces deux régions. Des plantes différentes y poussent, mais elles sont réparties de manière semblable en focntion de l'altitude. On peut encore en citer une autre pour la région macaronésienne ou les Canaries.[réf. souhaitée]

Région eurosibérienne

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Critères thermiques Étages de végétation
Température moyenne annuelle

(°C)

Température moyenne des minimums du mois le plus froid (°C) Hiver
< 4
< -7
Extrêmement froid étage nival
étage alpin
4
7
-6
-4
Très froid étage subalpin
8
11
-3
0
Froid étage montagnard
>11
1
10
Frais, chaud et tempéré étage collinéen
Planitiaire

Région méditerranéenne

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Les étages en région méditerranéenne sont influencés par un climat méridional, différent du climat alpin. Les phytogéographes ont donc renommé ces étages : étages thermo-méditerranéen, méso-méditerranéen, supra-méditerranéen, oro-méditérannéen et alti-méditerranéen.

Différents auteurs ont proposé une classification de l’étagement méditerranéen, voici une tentative de mise en parallèle :

Critères thermiques
Étages de végétation
Température moyenne annuelle (°C) Température moyenne des minimums du mois le plus froid (°C)
Hiver
Daget
(1977)
Ozenda

(1975)

Quézel
(1979)
Rivas-Martínez
(1981)
< 5
-11
-10
Extrêmement froid
Alti-méditerranéen
Alti-méditerranéen
Cryoro-méditerranéen
-9
-7
Oro-méditerranéen
-6
Très froid
Oro-méditerranéen
Montagnard-méditerranéen
5
8
-5
-3
Oro-méditerranéen
9
12
-2
0
Froid
Supra-méditerranéen
Supra-méditerranéen
Supra-méditerranéen
13
16
1
3
Frais
Méso-méditerranéen
Méso-méditerranéen
Méso-méditerranéen
>16
 
4
6
Tempéré
Étage thermo-méditerranéen
Étage thermo-méditerranéen
Étage thermo-méditerranéen
7
9
Chaud

Notes et références

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  1. a b c d et e« Étagement », sur Géoconfluences (consulté le )
  2. a b et cAlexandre et Génin 2012, p. 47.
  3. a b c d e f g et h« L'étagement des végétations ou comment le climat influe sur la flore », sur Conservatoire botanique national - Massif central (consulté le )
  4. a b et cAlexandre et Génin 2012, p. 48.
  5. Alexandre et Génin 2012, p. 49-50.
  6. Alexandre et Génin 2012, p. 50-51.
  7. a et bAlexandre et Génin 2012, p. 51.
  8. Pierre Moret, « Relire le Tableau physique de Humboldt à l'heure du changement climatique », sur CNRS, (consulté le )
  9. a et bAlexandre et Génin 2012, p. 53.
  10. Alexandre et Génin 2012, p. 54.
  11. Claude Tassin, Paysages végétaux du domaine méditerranéen, IRD Éditions, , p. 44.
  12. Frédéric Alexandre, « L'étagement de la végétation en montagne: un modèle à revisiter », L'information géographique, vol. 67, no 1,‎ , p. 45–59 (ISSN 0020-0093, DOI 10.3406/ingeo.2003.2875, lire en ligne, consulté le ).
  13. Paul Ozenda, « Sur les étages de végétation dans les montagnes du bassin méditerranéen », Documents de cartographie écologique, vol. XVI,‎ , p. 10-12 (lire en ligne)

Voir aussi

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Sur les autres projets Wikimedia :

Bibliographie

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  • Frédéric Alexandre et Alain Génin, Géographie de la végétation terrestre : Modèles hérités, perspectives, concepts et méthodes, Armand Colin, (présentation en ligne), « Chapitre 3. Le modèle de l’étagement de la végétation en montagne », p. 47-62. image
  • Alain Foucault, Climatologie et paléoclimatologie, Malakoff, Dunod, , 4e éd. (1re éd. 2009) (ISBN 978-2-10-087541-2), « Étagement altitudinal », p. 120-121
  • Claude Tassin, Paysages végétaux du domaine méditerranéen, IRD Éditions, (lire en ligne), « Chapitre 8. La complexité des étagements végétaux »

Articles connexes

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  • image Portail du bois et de la forêt
  • image Portail de la montagne

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